Rapport d'étape du groupe ad hoc de design
du Département de génie électrique et de génie informatique
Décembre 1997
*Le générique masculin est utilisé
ici |
Contexte
L'évolution de nos disciplines et des attentes de la société vis-à-vis la contribution du génie suscite actuellement une réflexion profonde au sein de la communauté nord-américaine sur la facture des programmes. Cette réflexion a notamment identifié le besoin d'une formation recentrée sur la dimension du savoir-faire, du savoir-être et du savoir-agir, développée dans la perspective d'une meilleure intégration des connaissances scientifiques et techniques, et mieux arrimée au développement de la personne, de ses habiletés et de ses attitudes. Indubitablement, ce sont les activités de synthèse, de conception et de design qui incarnent le plus concrètement cette dimension de la formation. Au cours de l'automne 1997, un groupe de travail a donc été formé, suite à la volonté de l'Assemblée, afin d'examiner le rôle et la forme que devraient prendre ces activités dans le cadre de la mise à jour continue de nos programmes, tradition ici bien établie. Le groupe de travail était constitué de M. Arias, R. Bergevin, M. Duguay, D. Grenier, D. Rancourt (génie mécanique), P. Tremblay, P. Viarouge et D. Poussart qui a agi comme coordinateur. Il s'est réuni à 5 reprises. Afin de faciliter la réflexion collective, des comptes-rendus sommaires ont été diffusés aux collègues par l'entremise du courrier électronique et plusieurs ont fourni des commentaires et suggestions. Une page web (http://www.gel.ulaval.ca/~poussart/design/) a également été activée afin de procurer un accès immédiat à un certain nombre de documents repères, en particulier ceux issus de l'Académie canadienne du génie et des organismes d'accréditation des programmes. Nous supposerons ici que le lecteur a bien pris connaissance de ces documents. Bien que nos programmes satisfassent bien les exigences actuelles du BCAPI en matière de conception et synthèse, cet axe de la formation n'apparaît pas suffisamment structuré, visible et énergique pour faire face aux défis futurs et et aux exigences anticipées d'accréditation. Une réforme substantielle s'impose. Il importe de nous donner un plan d'action, visant une pleine implantation pour la prochaine phase d'accréditation en 2002. Ce document constitue le point de départ de la démarche. Le pourquoi: Les objectifs des activités en conception Il convient de rappeler que les activités à connotation design représentent la dimension horizontale de nos programmes, celle qui confère toute leur plénitude aux enseignements théoriques et expérimentaux dispensés de manière traditionnelle. Cette formation en conception vise plusieurs objectifs, énumérés ici sans ordre particulier:
Les formes pédagogiques et les valeurs et attitudes à développer Le groupe de travail a identifié un ensemble de formules particulièrement propices au soutien de ces activités, que nous détaillons en Annexe. Toute activité à connotation design est l'occasion par excellence de l'apprentissage des attitudes et valeurs qui devraient caractériser une formation en génie de haute qualité. Le cadre de fonctionnement doit être conçu pour les mettre en évidence et leur permettre de s'épanouir. Il s'agit là, en fait, d' objectifs sous-jacents fondamentaux.
Ces valeurs sont bien mises en évidence dans les documents repères que nous avons signalés. Pour le professeur, il y a là des défis importants en matière de pédagogie. Pour l'étudiant, nombre de ces éléments relèvent de ce que l'on pourrait qualifier de développement de la personne. A cet égard, il est opportun de signaler que la Commission des études a récemment préparé un document d'envergure sur la question. Ce document, qui devrait être rendu public en 1998, propose un recentrage des programmes de l'université qui s'inscrit exactement dans l'esprit, et à maints égards dans la lettre de ce que nous proposons ici pour la formation en génie. Le quoi: les cinq facettes des activités en conception Un élément central de ces activités est que le problème abordé est ouvert: il est identifié par un objectif à atteindre et non par les moyens à utiliser. Ce problème doit aussi être suffisamment complexe pour que l'espace de solutions pose défi, compte tenu du niveau de développement de l'étudiant. Nous identifions les 5 facettes suivantes: I - Observation: mesures, identification des besoins et objectifs et de leur contexte (opportunités et contraintes), essais préliminaires nécessaires à cette identification, recherche d'information. II - Modélisation: analyse, abstraction de la situation, simplification, formalisation du problème, modèles du problème et des moyens, ajustement des architectures, simulation. III - Optimisation: vision critique dans la définition du problème, recentrage des objectifs ("pruning"), navigation qualitative et quantitative dans l'espace des solutions, analyse des risques, méthodes et procédures de synthèse, convergence dans le choix des moyens. IV - Implantation: réalisation du "produit", prototypage, essais, itérations, validation. V - Communication: dynamique de travail (individuelle et d'équipe), échanges et collaborations, gestion des ressources (personnes, équipements, temps), présentations orale, écrite, visuelle et multimédia, normes, documentation, communication technique en français et en anglais. Chacune des ces composantes comporte la familiarisation avec les outils, méthodes et pratiques pertinentes. Leur dosage relatif doit être soigneusement ajusté en fonction de l'avancement de l'étudiant dans son programme. C'est ainsi que dans une activité de 1ère année, nous voyons surtout l'emphase sur les dimensions observation et communication, avec une introduction à la modélisation. Le développement de la motivation et d'un engagement vis-à-vis la discipline et le programme est à ce niveau un objectif critique. La "rétroingénierie" et le "cahier des charges" (voir Annexe) sont des formules qui conviennent bien ici. En 4e année, on s'entend pour que la connexion avec la société soit un objectif central et que la composante implantation soit déterminante. En 2e et 3e année, le dosage passe progressivement de la modélisation à l'optimisation, avec une initiation progressive à l'implantation. Tout au fil du programme des quatre années, la dimension communication est sans cesse présente. A ce stade de la réflexion, il apparaît opportun qu'un accord de principe se dégage sur un certain nombre d'éléments importants d'une refonte à entreprendre dans la facture de nos programmes et dans la pratique de nos enseignements. En effet, au-delà de modifications formelles dans des listes et descriptions de cours, le groupe estime que la démarche doit obligatoirement s'accompagner d'éléments à connotation pédagogique. Il faut également comprendre que si la réflexion a permis d'identifier des voies prometteuses, il demeure un travail considérable, tant des lignes "directions de programmes" que "direction départementale et gestion des ressources" avant de finaliser cette réforme. Ce document doit donc être considéré comme un sketch initial, devant se prolonger par des analyses détaillées. Afin d'assurer la présence dynamique de ces activités, et ceci avec l'intensité et la visibilité qui s'imposent, le groupe en est venu à la conclusion de la nécessité de cours nommément identifiés à cette fin et propose donc:
~ Début ~
AnnexeSur les formules pédagogiques utiles à la formation en conception**
** Dans la majorité des cas, ces formules se réalisent en équipe.
RétroingénierieA partir d'un artefact technologique bien choisi, l'étudiant est placé dans une situation de conception par l'exemple, en passant successivement à travers les phases 1) d'observation, 2) de modélisation et 3) d'optimisation. Le scénario doit permettre de bien faire saisir la synergie entre les composantes et toute la dimension de leur intégration au service de la finalité de l'objet en question. Bien choisir l'artefact (et le renouveler au fil des années) constitue un défi de taille. L'objet doit comporter un éventail technologique approprié, être facilement accessible (coût modeste, ouvert à l'observation), et représenter un exemple engageant (motivant) d'un design réussi. En génie mécanique, on a récemment utilisé avec succès un inclinomètre, un séchoir à cheveux et un essuie-glace Mercèdes. En gel/gif on a déjà mentionné un lecteur de CD mais l'accessibilité interne est problématique, comme celle de nombreux objets contemporains, où le "packaging" est très avancé. Le "livrable" est une modélisation sérieuse du dispositif conduisant à une réflexion critique sur sa mise en oeuvre, accompagnée de suggestions sur une "version" optimisée (possiblement en fonction d'un champ d'application un peu différent). Design sur papierLe travail consiste ici à préparer un cahier des charges en fonction d'un "problème" pour la solution duquel l'étudiant n'a pas encore toutes les connaissances nécessaires. Il est nécessaire que la démarche s'effectue en boucle fermée avec un "client" (réel ou interprété) afin que la dynamique de l'identification des besoins soit soutenue. Le "livrable" du travail est une étude de faisabilité. Design réelLe travail prolonge ce qui précède par un livrable concret, une implantation tangible ("physique"), par exemple un logiciel ou un prototype de laboratoire validé et documenté. S'il est choisi afin de couvrir une problématique conceptuelle assez étendue, il se prête alors au format du projet de fin d'études ("capstone"). Design croiséLa formule consiste à impliquer deux équipes qui échangent leur rôle à mi-parcours. Design virtuelAvec la grande disponibilité de moyens de calcul évolués, la simulation - visualisation graphique, environnements 3D, environnements immersifs qui sont en plein développement - est venue s'ajouter aux sources traditionnelles de la connaissance (théorie, expérimentation). Elle dispose de nombreux atouts, comme celui de permettre de présenter des concepts abstraits sous une forme "tangible" (et donc de faciliter la compréhension), ou encore de rendre possible l'évaluation comparée de diverses approches reliées à des problèmes complexes (donc de faciliter l'exploration de l'espace des solutions). La présentation virtuelle s'appuie cependant (nécessairement) sur une modélisation (simplification) du monde réel et il demeure important que la distinction entre réalité réelle et réalité virtuelle soit bien comprise et assumée par l'apprenant. Celui-ci doit donc se sentir impliqué dans le processus de simplification. Il existe un potentiel considérable à exploiter (il existe déjà de nombreux exemples en milieu universitaire): il ne se construit guère plus d'objets technologiques, aujourd'hui, qui ne soient simulés de manière exhaustive avant d'être fabriqués. Cette approche peut contribuer efficacement au développement du sens physique, de l'optimisation, de la créativité. Mais elle exige un encadrement intellectuel rigoureux. MicroprojetOn entend ici une situation particulièrement bien balisée: il s'agit d'une réalisation qui a déjà fonctionné, et à risque d'échec minimal. L'objectif est de faire en sorte qu'avec le succès, l'étudiant développe à coup sûr confiance en ses moyens. Stage en entrepriseLe stage en entreprise, dans la mesure où il comporte de manière significative les facettes Observation, Modélisation, Optimisation, Implantation et Communication, peut constituer un excellent véhicule de formation en conception et design.
~ Début ~ |